Vieillir, signifiait surtout qu’avec l’âge un individu devenait incapable de subvenir à ses besoins. La règle était de travailler jusqu'à l’épuisement total de ses capacités. Ainsi dans nos campagnes, jusqu’au 19ième siècle, les personnes âgées sont prises en charge par leurs familles ou par les communautés auxquelles elles appartiennent.
Le premier système qu’il est possible de qualifier de régime de retraite est à destination des marins Français. Colbert en 1673, est contrôleur général des finances de Louis XIV et se rend compte d’un problème de taille. Les Marins qui passaient leur vie en mer, n’étaient pas capable d’accumuler et de valoriser un capital comme le ferait des familles rurales. Ils n’avaient alors pas de revenus possibles une fois qu’ils n’étaient plus en mer. Rappelons-nous qu’à cette époque, la bancarisation n’est pas celle que nous connaissons aujourd’hui et qu’il est par conséquent difficile de transférer de la valeur dans le temps et l’espace. Face à cette problématique et la nécessité d’avoir à disposition des hommes en excellente santé, Colbert va donc fonder ce premier régime de pension avec la Caisse des invalides de la Marine. Cette idée fera alors son chemin et d’autres corporations au service de la Royauté bénéficieront de ces premières pensions.
En 1790, le régime des fonctionnaires titulaires de l’état est créé, s’en suivra en 1831 celui des Militaires. Il est primordial pour l’état de développer ces couvertures sociales, les jeunes embauchés ont besoin de se savoir couvert pour accepter de quitter leurs villages. La Caisse Nationale des Retraites gérée par la Caisse des Dépôts est créée en juin 1850. Cette caisse est ouverte à tous, les versements sont libres, cela sera un échec. En effet n’étant pas obligatoire elle sera plutôt utilisée par des salariés aisés. La loi du 9 juin 1853 met en place un régime unifié pour les fonctionnaires. Ils ont alors droit à une pension après 30 années de service à partir de 60 ans.
Avec l’essor du salariat, va vraiment avoir lieu un bon en avant de l’assurance vieillesse. Les salariés ne sont, comme les marins avant eux, que très rarement en capacité d’accumuler du capital. Nous sommes alors entre la fin du 19ème et le début du 20ème siècle et les régimes d’entreprises ainsi que les retraites collectives au travers de sociétés de prévoyance se développent. Le patronat des grandes entreprises de l’époque participe au développement de ces régimes. Ce seront d’abord les ouvriers de la métallurgie et les mines en 1894, les chemins de fers en 1909. Ces régimes vont perdurer même après la création de l’assurance vieillesse de 1945. Pour information, ce sont ces régimes que nous qualifions aujourd’hui de régimes « spéciaux ».
L’Age de la retraite va rapidement faire débat, dès 1906 un projet de loi concernant la retraite ouvrière et paysanne prévoit un droit à la retraite à partir de 60 ans. En 1910, cette loi sera votée mais l’âge de la retraite sera alors de 65 ans.
"Comment financer une retraite pour les salariés qui n’avaient pas eu la possibilité de cotiser avant la guerre ?"
D’autres évolutions mineures suivront, mais c’est après la seconde guerre mondiale que va naitre le système général que nous connaissons tous. Car oui, avant la seconde Guerre mondiale notre système était un mélange de plusieurs solutions. Une partie de la population bénéficiait de la couverture des régimes spéciaux, une autre partie des dispositifs mis en œuvre par l’état, et quelques-uns d’une mutuelle. Les autres constituaient eux même leur propre retraite avec leurs moyens. Durant cette période, les mutuelles vont fortement se développer pour répondre aux besoins des Français. C’est dans ce contexte hétéroclite que l’ordonnance du 19 octobre 1945 va permettre la création du premier régime général de retraite. Ce régime dans le cadre de la Sécurité Sociale, est obligatoire et fondé sur la répartition. Le problème d’alors est simple : comment financer une retraite pour les salariés qui n’avaient pas eu la possibilité de cotiser avant la guerre ? Après à la Guerre le nombre de retraité était faible, et la répartition semblait être la solution parfaite. Les pensions des retraités sont payées par les cotisations des actifs, qui en même temps se constituaient un droit pour leurs futures retraites. Les droits à la retraite commencent à l’âge de 60 ans, après 30 années de travail. La pension représente 20 % du salaire de référence, ce qui correspond à la moyenne des dix meilleures années. Elle augmente de 4 % par année de service supplémentaire, pour obtenir un taux plein de 40 % à 65 ans.
Malheureusement, il est rapidement nécessaire de mettre en place des régimes complémentaires car les pensions sont plutôt faibles et l’article 18 de l’ordonnance du 4 octobre 1945 renforce la place des institutions de prévoyance. En 1947 seront mis en place les régimes complémentaires conventionnels pour les cadres AGIRC puis pour les non-cadres ARCCO. Elles deviendront obligatoires en 1972. Durant les 30 glorieuses, la reforme Boulin, relèvera sensiblement les niveaux de pensions en modifiant le mode de calcul. La retraite à taux plein à 65 ans passe de 40 à 50 % du revenu des 10 meilleures années et non plus des 10 dernières. En contrepartie, la durée de cotisation est allongée de 30 à 37,5 ans. En 1983, François Mitterrand instaure la retraite à 60 ans, contre 65 auparavant.
Sur les 30 dernières années il y a eu un enchainement de reformes plus ou moins bien acceptées. En 1991, Michel Rocard pose pour la première fois la question des conséquences du vieillissement de la population sur l’équilibre du fonctionnement du système de retraite. Par la suite en 1993 Édouard Balladur, en s’appuyant sur ce livre blanc, met en place un allongement progressif de la durée de cotisation de 37,5 à 40 ans en plus de modifications sur le mode de calcul des pensions. En 1999, Lionel Jospin crée le fonds de réserve des retraites. Sa vocation est de permettre de faire face à ce que l’on nomme alors le choc démographique. Ce choc, est la conséquence de l’arrivée à l’âge de la retraite des baby-boomers. En 2003, François Fillon alignera la durée de cotisation des fonctionnaires sur celle des salariés du privé (40 ans à 41 ans en 2012) ainsi qu’un dispositif pour les carrières longues. C’est aussi le début des produits d’épargne retraite que nous connaissons, les PERP, PERCO et PERE. Nicolas Sarkozy, en 2008 s’attaquera aux régimes spéciaux, et essayant de les faire tendre vers le régime général. L’ensemble de ces réformes ne conduiront pas à une situation stable du système Français. Par conséquent en 2010, Éric Woerth fait face à un déficit important du système, accentuée par la crise de 2008. Pour tenter de résorber ce problème, il sera décidé d’un allongement progressif de la durée de cotisation avec un recul du départ à la retraite à 62 ans et le report à 67 ans de l’âge automatique de la retraite à taux plein. Cet allongement de la durée de cotisation sera le fil conducteur de la réforme Touraine. Dans sa loi du 20 janvier 2014, Mme Touraine fait passer la durée de cotisation à 172 trimestres pour les personnes nées après 1973 au lieu de 160 à 166 trimestres. Afin d’éviter la faillite du système de retraite, les caisses de retraite complémentaires AGIRC et ARRCO fusionnent en 2019.
Le projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale (PLFRSS) promulgué le 14 avril 2023 et publié au Journal officiel du 15 avril 2023 est un nouvel exemple de ces changements continus. Cette loi allonge de 62 à 64 ans l'âge légal de départ à la retraite. Dès le 1er septembre 2023, cet âge sera progressivement relevé, à mesure de trois mois par génération à compter des assurés nés le 1er septembre 1961. Cette loi acte aussi la suppression des principaux régimes spéciaux de retraite pour les futurs embauchés.
La loi PACTE pour Plan d’Action pour la croissance et la transformation des entreprises, avait pour objectif de « lever les obstacles à la croissance des entreprises à toutes les étapes de leur développement : de leur création jusqu’à leur transmission, en passant par leur financement. » Dans un de ses volets, elle a aussi comme mission de renforcer l’attractivité de l’épargne de long terme et de l’orienter davantage vers le financement des entreprises.
C’est par conséquent ici que va naitre le Plan Épargne Retraite ou PER. Mais pourquoi donc créer un nouveau produit d’épargne alors qu’il en existe déjà un ?
La France est un des pays d’Europe ou l’épargne est la plus élevée. Nous savons par exemple qu’en décembre 2023 l’encours de l’assurance vie est de plus de 1900 milliards d’euros. Face à cela, des PER est plutôt faible car de l’ordre de 85 milliards. Les raisons sont relativement simples : l’épargne retraite était peu portable, l’offre était peu lisible, les modalités de sortie étaient rigides et le niveau de frais trop importants.
Le PER est un produit qui se révèle être la conjugaison de produits déjà existant. Il permet de déduire de son assiette fiscale les versements personnels effectués. Le plafond correspond à la plus élevée des deux limites suivantes :
10 % des revenus d'activité professionnelle de N-1 nets de frais, revenus retenus dans la limite de 8 PASS de N-1, Soit une déduction maximum de 35 194 € pour les versements réalisés en 2024.
10 % du PASS de N-1, soit une déduction minimum de 4 399 € pour les versements réalisés en 2024.
Ce produit d’épargne retraite s’articule autour de trois compartiments distincts :
Un PER individuel : Il s’alimente avec les versements volontaires, les anciens PERP et contrat Madelin.
Deux PER collectifs :
Un premier alimenté au titre de de la participation aux résultats des entreprises, c’est l’ancien PERCO.
Un second qui sera lui alimenté par les versements obligatoires des salariés et de l’employeur ce qui correspond au PER entreprise et les contrat Article 83.
Le PERin ou PER individuel remplace les PERP ou les contrats Madelin pour les travailleurs non-salariés. C’est un contrat qui repose sur la base d’une assurance vie. Cela permet d’avoir accès aux fonds euros mais aussi aux unités de compte. Tous les contrats sont proposés avec une offre dite de gestion pilotée afin de dynamiser les contrats tout en permettant une sécurisation progressive à l’approche de la retraite.
L’avantage fiscal est lui particulièrement intéressant pour les tranches les plus fortes. Par exemple, un versement de 10 000 euros permettra une économie d’impôts de 4 100 euros pour un souscripteur dans une TMI à 41%. La contrepartie est simple, l’épargne est bloquée jusqu'à la retraite et la fiscalité sera appliquée à la sortie du contrat. Des cas de sortie « anticipée » sont prévus et permettent de récupérer les sommes lors d’aléas de la vie ou du financement de la résidence principale.
L’autre évolution importante par rapport au PERP est la possibilité de choisir une sortie en rente (obligatoire sur le PERP) ou en capital. Cette nouvelle souplesse attire de plus en plus les investisseurs. Lors de la sortie en capital, les versements volontaires qui ont donné lieu à une déduction fiscale seront soumis à l’impôt sur le revenu. Les plus-values ou intérêts seront eux soumis au Prélèvements Forfaitaire Unique (Flat Tax de 30%) ou à l’impôt sur le revenu. Dans l’hypothèse où le choix se porte sur une rente viagère, cette rente sera taxée dans les revenus après un abattement de 10% dans une limite de 3812 euros. Les Prélèvements Sociaux ou PS, s’appliquent sur une fraction de la rente qui dépendra de l’âge du souscripteur au moment de la liquidation.
Versements volontaires déductibles de l’IR | Versements volontaires non déductibles de l’IR |
Fiscalité à la sortie : Les versements seront imposés à l’impôt sur le revenu et les intérêts au prélèvement forfaitaire unique. Option pour l’IR possible. En rente viagère : La rente est fiscalisée à l’impôt sur le revenu après un abattement de 10% dans la limite de 3812 euros. Les prélèvements sociaux s’appliquent sur une fraction de la rente qui dépendra de l’âge du souscripteur au moment de la liquidation. | Fiscalité à la sortie : En capital : Les versement sont exonérés d’impôts sur le revenu, les intérêts sont imposés à la flat tax de 30%. Une option pour l’impôt sur le revenu est possible. En rente viagère : La rente est fiscalisée à l’impôt sur le revenu et aux prélèvement sociaux de 17,2% sur une fraction de l’arrérage selon l’âge du bénéficiaire au moment de la liquidation à la retraite. |
Les frais dans un Plan Epargne Retraite.
Comme toutes les enveloppes d’investissements il y a plusieurs niveaux de frais et il est donc possible de dire que chaque PER a un prix. La rentabilité va donc être influencée par ces différents étages de coût du contrat. Pour rappel ces frais sont strictement identiques à ceux des contrats d’assurances Vie. La qualité d’un contrat ne s’apprécie pas uniquement sur ses frais.
Les frais sont donc ventilés sur les points suivants :
Les frais d’entrée ou frais de souscription.
Les frais d’adhésion ne sont pas toujours existants et vont de 10 à 50 euros.
Les frais sur versement :
Ils sont entre 0 et 5% en fonction des contrats. La traduction est que pour chaque versement sur votre contrat, il y a au maximum 5% de frais. Pour 100 euros de versés, 95 euros seront investis.
Frais de gestion :
Les frais de gestion sont entre 0,5% et 1,5% du capital placé sur le contrat. Ils sont prélevés une fois par an.
Frais d’arbitrage :
Ces frais seront appliqués lorsqu’il y aura une demande d’arbitrage. Il s’agit d’une demande de modification sur les supports internes du contrat, ou plus simplement passer d’un fonds d’investissement à un autre. Ces frais seront entre 0 et 1%.
Frais d’arrérage :
Il s’agit de frais prélevés lors du versement de la rente correspondant. Ils peuvent alors aller jusqu’à 3% de la somme brute versée à l’assuré.
L’attrait fiscal du PER et son impact sur l’effort d’épargne.
"L’économie est proportionnelle à la tranche marginale d’imposition ou TMI du souscripteur. Par exemple, elle sera de 30% si votre TMI est de 30%."
Pour un versement de 10 000€, l’économie d’impôt sera de 3 000€ si le souscripteur est dans une TMI à 30%.
Si elle est à 41%, c’est 4 100€ d’économie d’impôt et pour une TMI de 45%, c’est 4 500€. Ce mécanisme entraine une forme de levier fiscal sur ce placement. Contrairement à tous les autres placements, les fonds servant au versement n’ont pas été fiscalisés, cela entraine un très net avantage pour le PER. Nous pouvons matérialiser cet effort d’épargne par les calculs suivants :
TMI à 45% : 10 000 – (45% X 10 000) = 5 500€
TMI à 41% : 10 000 – (41% X 10 000) = 5 900€
TMI à 30% : 10 000 – (30% X 10 000) = 7 000€
Autrement dit, à effort constant le montant placé sur le PER est plus important. Cela permet de mettre en place une stratégie d’épargne retraite dont l’effet est maximisé grâce à l’attrait fiscal. Il est aussi possible de parler d’effet de levier fiscal dans la mesure où il est possible de voir l’économie d’impôts comme une forme de décote à l’acquisition. Nous pensons par exemple à l’association PER + Fonds immobiliers ou alors PER et ETF.
Pour conclure !
Le PER Individuel est une enveloppe fiscale vous permettant d'épargner à long terme pour préparer votre retraite et dont les sommes versées sont déductibles de votre revenu imposable dans certaines limites. Cela vous permet d'investir, dans un cadre fiscal avantageux pendant votre vie active pour obtenir à compter de votre départ en retraite, un capital ou une rente.
Il est fortement probable que le régime de retraite actuel soit à nouveau modifié. Dans cette optique, notre conseil est d'utiliser le PER pour constituer un capital important et pouvoir pallier à toutes éventualités négatives de reformes futures.
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